Les bons artistes n’agissent pas dans la clandestinité et sont dociles envers les gouvernements du monde entier qui louent leurs services pour façonner un paysage urbain conforme au pouvoir, entre un fast-food et un supermarché. En répondant à des commandes officielles, les bons artistes augmentent du même coup leur visibilité sur le marché de l’art, se retrouvent prestataires à la fois des politiques et des marchands. Ils versent dans une imagerie superficielle, typique de leur asservissement : chats et animaux en tous genres, emprunts au graphisme et à la BD, fausses coulures et motifs vaguement abstraits. A cet égard, les street artists sont dans la lignée des « fabricants d’art » qu’Albert Camus exècre (voir son Discours de Suède), apparus dans l’Europe bourgeoise d’après 1900 et qui, contrairement aux artistes, ont renoncé à leur liberté en acceptant de répondre à des commandes par lesquelles ils glorifient la « société des marchands ».
Via L’écriture de l’ombre – La photographie du graffiti de Bernard Fontaine, Editions Terrain Vague 2018.
Via L’écriture de l’ombre – La photographie du graffiti de Bernard Fontaine, Editions Terrain Vague 2018.