ET PENDANT CE TEMPS LÀ ...

February 13, 2019

HOMMES DE LETTRE

Les bons artistes n’agissent pas dans la clandestinité et sont dociles envers les gouvernements du monde entier qui louent leurs services pour façonner un paysage urbain conforme au pouvoir, entre un fast-food et un supermarché. En répondant à des commandes officielles, les bons artistes augmentent du même coup leur visibilité sur le marché de l’art, se retrouvent prestataires à la fois des politiques et des marchands. Ils versent dans une imagerie superficielle, typique de leur asservissement : chats et animaux en tous genres, emprunts au graphisme et à la BD, fausses coulures et motifs vaguement abstraits. A cet égard, les street artists sont dans la lignée des « fabricants d’art » qu’Albert Camus exècre (voir son Discours de Suède), apparus dans l’Europe bourgeoise d’après 1900 et qui, contrairement aux artistes, ont renoncé à leur liberté en acceptant de répondre à des commandes par lesquelles ils glorifient la « société des marchands ».

Via L’écriture de l’ombre – La photographie du graffiti de Bernard Fontaine, Editions Terrain Vague 2018.

albert camus
































February 06, 2019

La photographie du graffiti - Un livre de Bernard Fontaine

Dans son livre "L'écriture de l'ombre - La photographie du graffiti" Bernard Fontaine nous propose une analyse où art et sociologie s'entremêlent; une manière de voir le graffiti à travers l'analyse de photos de graffeurs et de photographes.

Après un bref rappel historique d'avant internet depuis les classiques (Henri Chalfant, Jon Naar, ...) jusqu'aux fanzines et magazines (Graff It, Mix Grill, Graff Bombz, ...) l'auteur aborde les années internet. Deux voies s'ouvrent alors aux photographes qu'il intitule "Le temps caché" et "La transmission authentique", chacune faisant l'objet d'un chapitre.

Le temps caché privilégie la quantité, instagram en étant le meilleur exemple. Côté livre c'est la vente de graffiti au poids, "l'archivage quantitatif a généralement peu d'égards pour les photographies, les recadrant dans les limites des seuls graffs, élaguant leurs hors-champs, réduisant au minimum les informations et les niveaux de lecture". (p.30)

La transmission authentique consiste à "saisir le temps", à ouvrir le graff à son environnement (graffeurs eux-mêmes, architecture, passants, ...). C'est par exemple accompagner le processus de création d'une pièce du début à la fin et saisir les interrogations et les repentirs de l'artiste ou suivre 24 heures de la vie d'un graffeur (24 hours with SAME par MJay - Overrated Magazine n°3).

Le parcours de GUES / SDK, interviewé par l'auteur, permet d'illustrer ces deux voies. Dans les années 1990-2000 il définissait ainsi une bonne photo de peinture sur train : "une photo où le modèle de la rame est identifiable, où la pièce est prise de face, sans contre-jour ni reflets et prise de jour pour assurer la plus grande fidélité aux formes et aux couleurs". (p.16) Plus tard : "Quand on s'est aperçu que l'on faisait des collections de pin's, on a évolué ... On s'est détaché de la pièce en elle-même pour s'intéresser au contexte." (p.17). Et encore : "GUES matérialise sa démarche photographique dans les livres qu'il produit ... La mise en page va permettre la construction d'un propos; en cela, et malgré internet, le livre reste l'espace privilégié de la photographie". (p.21)

En résumé, un livre qui nous fournit des pistes d'évolution dans nos pratiques photographiques.

Avec un portfolio d'une cinquantaine de photos d'Alex Fasko, Apôtre, Clément Criseo, JC Earl, Gues, KCBR, Guillaume R., Jean-Baptiste Barra, Marco La Photo, Norman Behrendt, Taprik, Ruediger Glatz, T., Zedz et Jack Stewart.

L'écriture de l'ombre - La photographie du graffiti
Auteur : Bernard Fontaine
Editions Terrain Vague 2018 - 172 pages - 25 Euros
ISBN : 978-2-490294-05-3

La photographie du graffiti - un livre de Bernard Fontaine couverure

La photographie du graffiti - un livre de Bernard Fontaine



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